Gustave COURBET
Ornans, 1819 - La Tour-de-Peilz (Suisse), 1877
L’Après-dînée à Ornans
Paris, Salon de 1849, médaille d’or seconde classe
Acquis par l’Etat, envoi FNAC, 1849
Sans cadre 195 x 257 ; avec cadre 234 x 300 cm
Inv. P 522
Une scène familière de la vie à la campagne
En convoquant les dimensions du format des peintures d’histoire dans ce tableau exécuté en 1849, Courbet élève le monde rural contemporain et transforme une scène banale de la vie quotidienne en un évènement historique. Trois hommes autour d’une table ne se souciant aucunement du spectateur à qui l’un deux tourne même le dos, écoutent un violoniste. Le tableau suggère le relâchement des corps, la rêverie et la détente. Chaque figure est d’une présence physique tangible.
Rien n’est embelli dans cette scène à la composition dense et aux empâtements contrastés. Rompant avec les scènes de la vie quotidienne de son époque, l’artiste s’inspire des scènes d’intérieur de Louis le Nain (1593 - 1648) mais aussi des effets de lumière de clair-obscur de la peinture du 17e siècle de Caravage comme La vocation de Saint Matthieu conservée à Rome. Mais ici Courbet abolit toute narration explicite et toute donnée anecdotique.
Dangereux pour Ingres (1780-1867), novateur pour Delacroix (1798 -1863), Courbet obtient malgré l’étonnement général, une médaille d’or de seconde classe ce qui lui accorde le droit de se soustraire à la sélection du jury pour la suite de sa carrière.
Aux origines du réalisme dans la peinture,
Face à ce tableau, les critiques de l’époque ont évoqué la mort de l’idéalisme en peinture, première fracture dans l’histoire de l’art. "L’après-dînée à Ornans" engendre un genre nouveau débarrassé des canons esthétiques académiques. Véritable manifeste d’un mouvement nouveau : le réalisme. Courbet bouscule la tradition et la hiérarchie des genres, il rompt avec les codes de la peinture romantique et les références à un monde intérieur et à la psyché, il rejette les sujets historiques et renverse les codes de la peinture académique en s’attachant à représenter la réalité visible sans artifice. Avec cette œuvre l’art devient le témoin d’une époque.
Liens de l’artiste avec Lille
Courbet écrit au conservateur Edouard Reynart (1802 – 1879) : « J’aurais eu à choisir un emplacement que certainement je lui aurais choisi moins beau et moins honorable. » Courbet revient plusieurs fois à Lille, il se lit à la communauté des peintres locaux et fait le "Portrait d’Amand Gautier" (1825 – 1894) peintre lillois (P 1771) conservé dans les collections du musée.
Une étude scientifique préalable à une restauration
Jamais restauré, ce tableau majeur de l’histoire de l’art n’avait été que partiellement étudié par l’imagerie scientifique en 1973. Le passage sous infrarouge et la radiographie avaient alors révélé que la composition notamment la position du bras du violoniste, avait été modifiée.
Il a donc été envoyé en février 2023 au C2RMF à Paris (Centre de recherche et de restauration des musées de France) pour bénéficier d’une étude complète menée par l’équipe de conservateurs et de scientifiques. Le tableau va subir une batterie d’examens tels que radiographie, fluorescence X, photos sous différentes lumières (infrarouge à ultraviolet, rasante…)
Cette étude poussée nous apportera les éléments nécessaires à une restauration à venir de l’œuvre.
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